Marseille
Faire revivre l’héritage de l’hospitalité méditerranéenne.
Principaux enseignements
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Depuis que la ville a élu une coalition de gauche en 2020 après des décennies d’administration conservatrice, des employés de la municipalité et la société civile travaillent plus étroitement ensemble.
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Marseille s’est engagée à une politique d’ouverture de son port, avec ses responsables politiques qui se réfèrent à l’histoire de la ville en tant que capitale de la Méditerranée : « Quand une personne se noie, on ne lui demande pas ses papiers, on la sort de l’eau »
Qu’est-ce que la ville a d’unique ?
Un port de nouveau ouvert après des années de stagnation : Marseille, qui est l'une des villes portuaires historiques de la Méditerranée, a un long héritage de migration. Mais au cours des dernières décennies, les gouvernements locaux n’ont pas promu d’approches inclusives envers les nouveaux·elles arrivant·e·s. De nombreuses initiatives civiques sont depuis venues en aide à la population migrante pour accéder à un logement, leur fournir une aide de base et mener des campagnes pour les droits des migrant⸱e⸱s. L’élection de la maire Michèle Rubirola, à la tête d’une coalition de gauche menée par Europe Écologie-Les Verts en 2020, a donné une tournure progressiste à la politique locale et a fait de Marseille l’une des villes de solidarité les plus actives en ouvrant son port et en s’engageant dans des réseaux internationaux de villes.
Quels sont les facteurs clés ?
Des activistes de longue date et une nouvelle administration font connaissance : la coopération entre les pouvoirs publics et la société civile de Marseille est assez récente, malgré la longue expérience des initiatives de la société civile et des ONG en matière d’accueil des nouveaux·elles arrivant·e·s dans la ville. L’année 2020 a marqué un point de rupture dans la vie politique locale. La nouvelle administration municipale s’est engagée à recadrer la politique d’immigration et d’inclusion, une approche que les médias locaux ont décrite comme le « Printemps marseillais ».
Quels sont les résultats les plus marquants à ce jour ?
Les responsables politiques de la ville se prononcent en faveur de l’accueil inconditionnel des migrant⸱e⸱s : l’engagement en faveur d’une politique d’ouverture de son port et les interventions publiques de la maire pour un accueil inconditionnel des migrant⸱e⸱s constituent les changements les plus visibles que le nouveau gouvernement municipal ait réalisés. La relation moins antagoniste entre la ville et la société civile a permis une plus grande participation des deux parties aux initiatives nationales et internationales des villes solidaires.
Quelles sont les actions politiques et de plaidoyer au-delà du niveau municipal ?
Marseille renforce sa position de ville d’accueil au niveau national et international. La nouvelle administration s’est engagée dans des réseaux avec d’autres villes, par exemple, en rejoignant [l’Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants (ANVITA) et le Réseau Communautaire Solidaire en soutien à SOS Méditerranée. En juin 2021, Marseille a également rejoint l’alliance From the Sea to the City.
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Le rapport contient plus d'informations sur les politiques migratoires et d'inclusion de la ville, ainsi qu'une séléction d'approches locales. Rapport de 2021, mis à jour en 2023.
Contexte politique de France
Comment est organisée la politique migratoire en France ?
La politique migratoire française est coordonnée de manière centralisée, en particulier par la Direction générale des étrangers en France (DGEF) qui coopère avec le ministère de l’Intérieur sur l’immigration, l’asile, l’intégration et la loi sur la nationalité. Même si les lois sont appliquées au niveau national, la coopération avec les territoires locaux s’est intensifiée depuis 2015 en réponse à la soi-disant « crise des réfugié⸱e⸱s ».
Quel est le contexte historique ?
La politique migratoire française a été historiquement marquée par son passé colonial. Une loi de 1899 a, à l’origine, « assuré la nationalité française à tou⸱te⸱s les étranger⸱ère⸱s né⸱e⸱s en France et parvenus à leur majorité ». En 1993, cette loi a été annulée et la nationalité n’est plus automatiquement assurée. En 1945, l’introduction de la carte de séjour a facilité le rassemblement familial et les parcours d’intégration depuis les années 50. En 1956, les politiques se sont développées en lien avec la migration économique, en particulier sur les travailleur⸱euse⸱s étranger⸱ère⸱s et leur accès au logement. Entre 1981 et 1985, le gouvernement Mitterrand a permis la régularisation de 130 000 étranger⸱ère⸱s en situation irrégulière et a allégé certaines mesures. Mais la loi Pasqua au milieu des années 80 a limité les conditions d’entrée et de séjour et encouragé les expulsions. En 1990, le premier ministre Michel Rocard a déclaré « Je pense que nous ne pouvons pas héberger toute la misère du monde, que la France doit rester ce qu'elle est, une terre d'asile politique […], mais pas plus ». Depuis les années 2000, la politique française s’est alignée sur la politique européenne, limitant les conditions d’accès pour l’immigration choisie.
Le droit à l’asile, une valeur fondamentale des constitutions de 1946 et de 1958, s’est progressivement aligné sur la politique européenne, en particulier sur le paquet de lois sur l’asile en 2009.
Selon l’INSEE, en 2018, il y avait 6,5 millions d’immigrant⸱e⸱s vivant en France, alors que le nombre de français « d’origine étrangère » était de 7,7 millions. Le nombre de personnes demandeuses d’asile a augmenté régulièrement de 2008 à 2019 avec une baisse en 2020. En 2019, 132 614 dossiers (incluant les personnes mineures non-accompagnés et les renouvellements) ont été soumis à l’Ofpra (une augmentation de 7,3% comparé à 2018). 36 512 personnes ont reçu une protection en France en 2019 (contre 33 330 en 2018 soit une augmentation de 9,5%).
Quels ont été les principaux développements ces dernières années ?
La France a suspendu Schengen et réintroduit les contrôles à la frontière avec l’Italie dès le printemps arabe de 2011. Durant la « crise des réfugié⸱e⸱s » de 2015, la France a démantelé la jungle de Calais et établi des [Centres d’Accueil et d’Orientation (CAO)](https://www.economie.gouv.fr/daj/intervention-CAO-attribution-marches-publics-2016; https:/www.psmigrants.org/site/ressources-juridiques/cao/) avec environ 12 000 places disponibles, afin d’héberger les migrant⸱e⸱s récemment arrivé⸱e⸱s pour une période maximum de 3 mois. Ces structures appartiennent ou sont louées par l’État, afin d’accueillir temporairement les migrant⸱e⸱s et de les « faire réfléchir sur leur projet de migration ». [En 2015, le gouvernement Hollande a réintroduit les contrôles à la frontière, en déclarant l’état d’urgence à la suite des attaques terroristes de Paris.](https://www.economie.gouv.fr/daj/intervention-CAO-attribution-marches-publics-2016; https:/www.psmigrants.org/site/ressources-juridiques/cao/)
En accord avec l’approche de l’UE, la politique migratoire et de l’asile a connu un certain nombre de développements. D’abord, des missions ont été organisées pour évaluer les demandes d’asile en dehors du territoire français. Ensuite, les contrôles aux frontières ont été renforcés, avec des cas documentés de refoulements de personnes mineures non-accompagnées, et des violations régulières, si ce n’est systématiques, des droits fondamentaux, notamment des détentions de fait. Enfin, beaucoup de demandeur⸱euse⸱s d'asile ont été laissés sans hébergement et des camps ont été régulièrement démantelés dans les grandes villes ou dans le nord de la France (comme à Calais ou à Grande Synthe). La capacité d’accueil est également limitée, avec seulement 51% des demandeur⸱euse⸱s d'asile éligibles matériellement pour l’accueil à avoir été hébergés. De plus, un grand nombre de réfugié⸱e⸱s dont le statut a été reconnu quitte les centres d’accueil sans avoir nulle part où aller. Au premier semestre de 2020, seulement 1 755 personnes ont quitté le système d’accueil avec une solution de logement. Beaucoup sont devenus par la suite des sans-abri ou vivent dans des camps informels.
Quelles sont les réussites des campagnes progressistes ?
En septembre 2015, le ministre de l’Intérieur Cazeneuve a envoyé une lettre aux maires de France, les invitant à une réunion pour « appliquer les propositions d’accueil dans les meilleures conditions », ce qui inaugura un processus de décentralisation de l’accueil.
Au niveau national
Le 18 décembre 2018, un « plan national d’accueil pour les demandeurs d’asile et pour l’intégration des réfugiés pour 2021-2023 » a été publié. Il prévoit la possibilité d’adapter la politique d’accueil au nouveaux contextes migratoires et aux caractéristiques régionales spécifiques, notamment une meilleure distribution des demandeur⸱euse⸱s d'asile à travers le territoire national.
Au niveau de la société civile
Des réseaux collaboratifs se sont développés avec pour objectif de s’opposer aux politiques gouvernementales de non-accueil et de faire des propositions alternatives en dialoguant avec les communes. La création des États Généraux de la migration en 2018 : « Les États Généraux des Migrations sont un processus dans lequel sont impliqués des centaines de collectifs et d’associations locales ou nationales présentes sur le terrain aux côtés des personnes étrangères. Partout en France, ces acteurs⸱trices se concertent et organisent des événements publics pour dénoncer la politique actuelle et être force proposition afin d’obtenir un changement radical de la politique migratoire ». Les Sans-Papiers se sont organisés, culminant en une marche vers l’Élysée en octobre 2020.
Au niveau des autorités locales
Crée en 2018 par neuf villes fondatrices, l’Association Nationale des Villes et Territoires Accueillants (ANVITA) rassemble des collectivités territoriales, des collectifs et des représentants élus. Ses membres œuvrent à une politique d'accueil inconditionnelle pour les personnes en exil, mais aussi à promouvoir l'hospitalité sur le territoire français. Actuellement, l’association compte près de 50 membres. L’une de ses demandes principales porte sur l’accès intégral aux services et l’égalité des droits pour tou⸱te⸱s les résident⸱e⸱s.